Valérie Simonnet
Je crois que nous ne voyons que ce que nous sommes et qu'on ne peut donc jamais photographier que soi. Je ne crois pas à l'objectivité photographique pas plus qu'à celle du roman et le réalisme photographique me semble un écueil ou une merveilleuse fausse piste pour raconter des histoires. Pour reprendre la citation de Cocteau, la photographie est un mensonge qui dit la vérité. La vérité que je tente d'approcher n'est assurément pas celle du monde mais beaucoup plus modestement la mienne. On a qualifié mes images de paysages intérieurs et c'est probablement la définition que je préfère de mon travail. Chaque image n'a d'autre finalité que de tenter de faire passer, d'amener sous mes yeux une émotion, une pensée, un sentiment intérieur. La seule vérité que je recherche est une justesse par rapport à moi. Ne pas tricher avec ce que l'on est, c'est déjà une aventure plus que difficile et qui curieusement permet d'aller à la rencontre des autres. Plus on dit vrai sur soi dans une singularité sincère, plus on va profond et plus on accède à une sorte de vérité commune. Curieusement, ma démarche photographique est très peu construite, très peu volontariste, très peu mise en scène. Je me suis rendue compte que la justesse s'atteignait plus volontiers dans une sorte d'abandon de la volonté, dans une passivité du cortex, dans une submersion de la vision. Merveilleux mot que vision qui désigne à la fois ce qui est, ce qui se présente à l’œil et ce qui n'est pas, ce qui est pure imagination. Ce que je vois est donc ce que je suis.